À quelques jours du deuxième tour des élections régionales en France, je
voudrais aborder un sujet que je n’ai jamais abordé ici, du moins directement.

On a, de tous temps, et aujourd’hui encore, reproché à des artistes,
comédiens, musiciens, d’exprimer leurs pensées politiques, leurs choix, leurs
engagements, comme si ce n’était pas de leur ressort.

On a par ailleurs reproché à des artistes, comédiens, musiciens, de ne
pas exprimer d’attachement politique, reproches qui ont par exemple longtemps
accompagné Georges Brassens.

Aujourd’hui, entre les deux tours
de cette élection, ne me quitte pas l’image d’une carte de France qui porte des
couleurs qui me font frémir. Et la peur qui me vient est bien plus grande que
celle que l’on voudrait faire germer en nous suite aux attentats de ce dernier
13 novembre.

Et je ressens le besoin de m’exprimer à ce sujet, simplement, avec ce que
je suis, avec les valeurs que l’on m’a transmises, que j’ai à mon tour tenté de
transmettre, à mes enfants, à mes proches, mais également, quoique l’on puisse en penser, au travers de mon travail et de ma peinture.

La politique. J’ai souvent entendu autour de moi des personnes dire n’y
rien comprendre, ne pas vouloir s’y intéresser, répéter que ce sont tous des
pourris, que voter ne sert à rien…

J’ai voté pour la première fois en 1988, pour François Mitterrand.
Il a
fait de bons et de mauvais choix, il a été précédé et suivi par des hommes qui
à leur tour ont fait de bons et de mauvais choix. J’ai pu constater au fil des
années que rien n’était simple, qu’à gauche comme à droite la corruption était
partout, que la soif d’argent et de pouvoir abimait tout, même les convictions
les plus profondes.
J’ai pu constater également que quelques femmes et hommes,
même si ce ne sont pas ceux qui font le plus parler d’eux, continuaient de
travailler au service de la communauté, sans rien concéder de leur intégrité,
de leur honnêteté, avec éthique et dans le plus grand respect des valeurs
humanistes que jamais ils n’ont cessé de défendre.

Ils sont rares mais je veux croire qu’ils existent.

Car quoique l’on pense ou ne pense pas, la politique c’est nous, notre
quotidien, notre vie, la politique est partout. La politique c’est tenter
d’inventer les moyens de vivre ensemble au mieux, avec nos infinies
différences. La politique sera toujours un immense chantier, car le monde
change sans cesse et la communauté humaine doit s’adapter et faire évoluer ses
manières de vivre au gré de ces incessantes transformations.

Depuis cette année 1988 je n’ai jamais cessé de voter, et de voter à
gauche. Et même si, comme beaucoup, j’ai perdu foi en une classe politique qui
a trahit mon vote et mes idéaux, même si, comme beaucoup, j’ai perdu foi en
ceux qui se disent incarner les valeurs du socialisme et de la république mais
qui, dans leurs actes, agissent à l’opposé, je continue de croire que seules la
solidarité, la justice sociale, la fraternité, la responsabilité de chacun,
l’égalité, peuvent nous permettre de vivre mieux ensemble.

Ces valeurs restent celles de la gauche, d’une gauche que l’on cherche
certes, mais qui existe en chacun de ceux qui, au quotidien, continuent d’agir,
de réfléchir, d’œuvrer pour un vivre ensemble qui n’est pas celui du mensonge, du mépris, du rejet, de la haine et de la peur.

Penser que l’extrême droite ou la droite devenue extrême nous mèneront à un mieux vivre je ne peux y croire, et dimanche, malgré ma foi envolée, je voterai à “gauche”.
Je vis dans une région où il est encore possible de le faire, j’espère vivre dans un pays où demain, à l’échelle nationale, il sera encore possible de le faire.

Cela dépend avant tout de nous.