Collecter d’abord, prendre le temps.

Vêtements usagés,
dépassés, aimés,
lambeaux précieux et
pourtant fatigués,
objets las d’avoir trop
vécu, objets perdus,
cailloux, brins d’herbe, rubans oubliés et bouts
de fer rouillé.

Miettes de vie,
blessures, déchirures,
traces du temps, du vent,
de tous les doigts qui sont passés par là,
histoires inconnues et
pourtant marquées à même leur peau
de bois, de papier jauni, de tissu
fané, élimé.

Rassembler, assembler,
donner corps à ces
fragments épars,
les relier, les joindre,
les superposer,
comme s’empilent en nous et
en strates
nos mémoires.

Et lentement,
à petits points,
offrir à ces corps de
grès, de fer et de tissus glanés,
un habit, une parure, une
singularité.

Trésors
de trois fois rien accumulés et dispersés dans l’atelier,
fragments
de mémoire effilochée que je reprise,
que
j’associe, que je relie, que j’assemble en un tissu nouveau,
une
toile fragile sur laquelle m’appuyer,
pour
ne pas perdre, et
pour ne pas me perdre.

Exposés là pour deux semaines,
cinq porteurs de mémoire.

C’est un projet qui germait en moi depuis longtemps, prenait son temps.

Ils
sont cinq vêtus de bouts de mes culottes, pantalons, chemises,
d’autres bouts
chinés en brocantes ou récupérés dans l’atelier de ma mère,
dans les
échantillonniers de mon père, de bouts venus de très loin que Sadaf
m’a donnés,
ces bouts magiques brodés et rebrodés qui sont déjà passés
par tant de mains,
tant de savoir-faire, tant d’histoires superposées.

Ils
sont cinq et chacun m’est précieux,
chacun porte une histoire constituée de
mille autres,
de ces bulles de mémoire qui, ces derniers mois,
au fil du rythme
lent de l’aiguille n’ont cessé, en moi, de remonter.

Pour les rencontrer, c’est à Lyon,
Galerie 7, place Gailleton,
jusqu’au 21 octobre.

Exposition Fragments reliés,
avec Michelle Cognet, Sadaf et Grigri la tomate.

Nous serons présentes ce prochain samedi 15 octobre,
de 10 heures à 18 heures.

À bientôt?