Uniformiser donc.
Les minots, les plus grands,
pour gagner des sous, pour gagner du temps…

Imaginons la joie de maman et papa le matin,
et la joie des enfants.
Plus besoin de penser, de réfléchir,
à comment se vêtir.
Non, là au pied du lit,
tous les matins de la même vie,
la même tenue, les mêmes habits,
pour tous les jours et tous les enfants d’un pays.

Vous imaginez? Le gain d’espace de temps d’argent de liberté d’égalité ?

Vous imaginez le bonheur de ne plus avoir à penser à comment se fringuer ?
Donc à comment se dire,
comment se raconter,
comment exprimer qui on est,
comment crier sa singularité, sa différence, son unicité.

Plus de temps perdu à inventer, à s’inventer,
plus d’argent perdu à tenter d’exister avec qui on est,
avec qui on veut être,
même plus besoin de respirer.

Oublions tout cela,
ils ont pour nous l’uniforme solution,
un pour tous et tous le même.
Et pourquoi pas un pyjama rayé ?

Et on nous dit que cela gommerait les disparités
sociales, économiques, religieuses!
Les riches en seraient donc moins riches, les pauvres moins pauvres,
les croyants moins croyants ?

Ils savent que c’est pour notre bien,
ils ont connu cela, et ils n’en sont pas morts.
Ils savent si bien ce qu’il nous faut,
ce dont on a besoin.

Alors Madame l’épouse de,
et Messieurs Dames en bleu foncé cravate et tailleur ajustés,
je réponds à votre appel d’offre.

Une tenue pour jeune fille,
une pour jeune garçon,
confortables et pas tristounes.
Idéales pour la pratique du sport comme pour celle de la dictée (c’est économique),
avec des références à Henri Matisse et à Yves Klein (c’est artistique),
mais également au monde du travail (car faudrait pas croire qu’on est là pour chômer),
un petit nombril aéré, pour l’uniformité (tout le monde a un nombril, alors pourquoi le cacher ?),
quelques rayures pour mémoire,
et avec ça, interchangeables!

On s’y met ?
À réfléchir, ou à uniformiser le monde?