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Gaëlle Boissonnard, un peu plus loin...

Retour de résidence

En cours, Tenter de dire Posted on 11 Avr, 2023 12h30

Deux semaines,
c’est bien court pour parcourir la terre,
l’explorer dessus, dessous, dedans,
au creux de ses recoins cachés.

Deux semaines dans une bulle hors du temps,
à parcourir de nos doigts et de nos doutes l’idée de l’ombre fertile,
du ventre qui protège,
qui enfante comme la terre offre ses replis aux graines,
aux racines, aux rhizomes, aux germes oubliés,
pour couver la vie, la soigner, la protéger,
l’inventer.

Ces deux semaines de création et de bonheur dans la lumière d’un immense atelier
nous ont été proposées par l’association Arte Diem,
qui œuvre pour le partage et la reconnaissance de la création céramique depuis plus de trente ans.
Merci à toutes celles et ceux qui nous ont accueillies et accompagnées joyeusement
durant ces 16 journées de création.

Merci également à Chloé Sorbe, pour les très belles photos réalisées pendant ce temps de résidence.

Les pièces réalisées pendant la résidence, qui seront sans doute complétées par d’autres que nous réaliserons un peu plus tard dans nos ateliers, seront exposées dans l’espace d’Arte Diem,
à Saint-Chamond, à partir du 10 novembre prochain.

Et puis, parce que je reste celle que je suis, et qu’à peine sortie de ma bulle je retrouve mes colères
et mes révoltes face à l’injustice d’un pouvoir qui n’œuvre que pour accroitre toujours plus les inégalités sociales, j’ai envie de partager avec vous ce texte admirable écrit par Lola Lafon et publié dans Libération la semaine dernière.
Il fait écho au thème que nous avons choisi d’explorer durant ces journées d’exploration de la terre,
celui du féminin et du végétal qui se rejoignent dans cette incroyable énergie à inventer la vie.
Alors oui, continuons, insistons, encore
et encore.



Réforme des retraites : Manu ciao?


“Voilà qu’en ce début de printemps, quelque chose survient. Quoi qu’il en coûte, il s’agit d’éteindre ce qui naît. Ce pouvoir aux abois ne sait plus faire que ça.

Tout ne pouvait pas se résoudre à cela, à dresser des listes de ce qui mourrait bientôt, ces listes qu’on finirait par trouver tragiquement poétiques : les tigres de Sunda, les licornes asiatiques et les séquoias géants. Tout ne pouvait pas se limiter à cela, à s’alarmer, à agiter des sonnettes d’alarme.

Tout ne pourra pas se résoudre à ça : à colmater, à réparer.

Nous savons tout de la réparation, nous sommes rompus à nous «acclimater» à ce qui nous détruit. Nous savons les ravages de ce qu’on avale de force, de tout ce qu’on ravale, ce magma de solitudes et d’impuissances. Et on s’y est presque faits, pour ne pas dire résignés, à avoir en commun la peur de faillir, de ne pas tenir, de s’affaisser, la peur de ce qui nous attend, la peur de ce qui ne nous attend plus.

On s’échange les adresses de thérapeutes, des recettes bien-être, on décline les couleurs apaisantes sur les murs de notre appartement. On ne se dit plus au revoir mais «prends soin de toi», comme face à un cataclysme que l’on sait inéluctable.

On s’y est presque faits, à n’être en quête que de ça, dans les amitiés, les voyages, les plantes ou les romans : une réparation. A rechercher en tout de quoi fonctionner encore, à la façon de petites machines tristes et efficaces, vaillantes, beaucoup trop vaillantes. Mais voilà qu’en ce début de printemps, quelque chose survient, qui grippe la machine. Ce quelque chose, dont personne, au moment où j’écris, ne connaît l’issue, est un rappel. Un réveil. Quelque chose a lieu qu’il faudrait se garder de définir, de circonscrire. S’agit-il de questionner la place du travail dans nos vies ? Certainement. S’agit-il d’une conscience inquiète du temps qui nous reste ? Certainement. De ce qu’il faut reprendre, arracher à un capitalisme morbide qui ne sait plus faire que ça, nous inoculer le désir des choses inutiles ? Certainement. S’agit-il de balancer par-dessus bord cette façon que l’on a eue, des années durant, de se définir par le travail, cette question réflexe, quand on se rencontre : et toi, que fais-tu ? Ce marqueur social impitoyable qui exclut de la conversation chômeurs, retraités et tous ceux et celles qui n’ont pas choisi ce qu’ils «font», que leur métier ne définit pas ?

Le «quelque chose» de ce printemps est un mouvement. Mouvement a pour synonymes ardeur, élan, émotion et vie. Si, dans les manifestations, des cortèges se réapproprient le tube de Mylène Farmer Désenchantée, les corps, eux, contredisent ce constat désespéré : les manifestants dansent, ils reprennent l’espace.

L’entrée en force de la danse dans les cortèges n’est pas anecdotique, elle dit, mieux que ne le font les traditionnels slogans syndicaux, la joie de faire corps, de se tenir ensemble, ce désir d’être uni·e·s. «Si je ne peux pas danser, je ne veux pas prendre part à votre révolution», disait Emma Goldman. Cette foule qu’un pouvoir hagard réduit à des chiffres mobilisation en hausse ou en baisse – prend la parole en un surgissement poétique, politique : les pancartes affichent un humour noir, un humour pop, aussi, ces «Manu Ciao», «Femmes : 22 % de retraite en moins et il paraît qu’on chiale pour rien», «Y’a pas de moyens dja dja», «Je ne veux pas mourir sur scène» ou «Moins de flashball et plus de flashdance».

J’aurais aimé pouvoir arrêter ma chronique ici. J’aurais aimé n’écrire que cela. J’aurais aimé ne pas écrire ceci : qu’un manifestant est entre la vie et la mort. Qu’un autre sort à peine du coma. Que d’autres, combien d’autres, ont été mutilé·e·s. Certaines ont subi des violences à caractère sexuel lors d’un contrôle policier. Des centaines ont été arrêtées de façon arbitraire, «préventivement». Quoi qu’il en coûte, il s’agit d’éteindre ce qui naît. Ce pouvoir aux abois ne sait plus faire que ça. Mais comme l’écrit l’Association pour la défense des terres dans une tribune parue le 1er avril : «Les limites planétaires ne sont pas des données que l’on peut mettre à genoux, matraquer, faire rentrer dans le rang ou intimider.»

Sans doute le savent-ils très bien, ceux-là qui ont cru pouvoir résoudre les existences comme autant de fractions : il se passe quelque chose, ce printemps, dans les rues. On y reprend vie. On revient à soi, mais ensemble. On déborde du cadre. Et le printemps a ceci de commun avec la vie : il insiste.


Toutes les photos de cet article ont été réalisées par Chloé Sorbe.



Rencontre

Bientôt. Posted on 19 Mar, 2023 17h42

Deux dates à retenir,
pour échanger autour des pièces auxquelles Sylvie et moi
tenterons de donner corps,
lors de la résidence qui nous a été proposée par l’association Arte Diem.

Vous êtes bienvenus
les jeudi 23 et 30 mars, entre 18h et 20h,
dans les locaux d’Arte Diem,
pour un temps de rencontre et de partage.

Arte Diem,
c’est 5 rue de Bretagne à Saint-Chamond,
dans la Loire.

À bientôt!



Bleu, bleus

Bientôt. Posted on 13 Mar, 2023 11h40

Il ne m’a pas fallu plus de trois pas
pour trouver le bleu.

En quelques jours il s’est glissé dans le vert.
Il fait tache,
appelle nos regards,
nous rappelle au monde et à la possibilité d’un éveil,
d’un réveil…

Dans sa multiplicité
il s’est aussi couché sur le papier.
Devenu livre,
comme les premières fleurs printanières,
il se dévoile.

Conjurer la nuit est un livre d’artiste créé lors de deux ateliers partagés
avec mon amie céramiste et peintre Sylvie Delphaut.
Le sien se nomme Apprivoiser l’abime.
Les deux fonctionnent en miroir, se jaugent et se racontent sans mots.
Ils explorent nos rapports aux profondeurs sans fins,
celles des paysages privés de lumière
et celles des abysses marins.

Ces bleus, multiples, fascinants et difficiles,
nous les avons explorés pendant des jours avant de leur donner corps.

Ces deux livres seront visibles,
parmi de nombreux autres,
à partir du 1er avril, à la médiathèque Jules Verne de la Ricamarie (Loire).

Une bibliothèque bleue, chapitre 4.
Exposition de livres d’artistes, du 1er avril au 13 mai 2023.
Vernissage le 1er avril à partir de 15 heures.



Il est un jour

Tenter de dire Posted on 08 Mar, 2023 12h27

Pour les femmes, pour leurs droits.

Il en a été décidé ainsi.

Un jour pour le souvenir,
comme un bouquet de roses qui viendrait leur dire,
Tu sais je ne suis pas souvent là,
j’ai été dur parfois,
je ne me suis guère préoccupé de nos enfants,

de tes envies ou de ta liberté,
j’ai quand même mieux à faire,
j’ai des responsabilités,
et puis je travaille moi,
je ramène un salaire pendant que tu tricotes,
et puis j’ai besoin d’air, j’ai ma vie à vivre,
et ça suffit à la fin, regarde, je t’ai apporté des roses,
rouges,
un plein bouquet,
tu vois je suis là je pense à toi,
c’est ton jour, ta fête,
ça ne te suffit pas?

Une journée internationale des femmes comme un bouquet de roses reçu en pleine figure.

Et ce jour-là tout le monde s’y met,
et on commémore, et on légifère, et on donne la parole,
et la presse, et l’assemblée, et même le palais n’en finissent pas de se passer le relais.
Car c’est notre journée, la leur,
celle de toutes les opprimées, les violentées, les dominées,
celles qui nettoient soignent et balaient,
celles qui se terrent, celles qui se déguisent en échassier à bec rouge pour mieux exister,
celles qui ont dit non, mais…
celles qui n’ont pas osé,
celles qui ne savent pas même pas qu’elles en ont le droit.

C’est leur jour, le nôtre,
il faut en profiter, ça ne fait que passer.
Demain se sera terminé, les roses rouges seront fanées.

Demain,
elles reprendront leur tablier.

Mon tablier à moi, le voilà.
Presque propre,
il sèche au chaud,
entre deux chantiers.
Entre porcelaine et couleurs sur papier,
sur fils de laine, de soie et de coton,
entre deux recherches, deux explorations.

Aujourd’hui c’est sa fête,
la fête des tabliers qui vivent et m’accompagnent
dans ma vie de femme qui, aux roses rouges, préfère les mauvaises herbes,
les fleurs des champs,
celles qui poussent en liberté,
loin des canons et des poisons.

Demain, ce sera sa fête aussi, et puis après-demain.
Il reprendra le chemin des taches bariolées,
tentera avec moi d’inventer des parcelles de vie,
de lumière.

Alors,
bonne fête aux tabliers!



En attendant…

Bientôt. Posted on 23 Fév, 2023 10h36

le printemps,
et ce temps de résidence partagée,
qui approche,
et dont, lentement, je m’approche.

M’approcher de ce temps de création particulier,
(rares sont les occasions de travailler à deux,
rares également celles de le faire ailleurs que dans cette bulle qui est mon atelier,
rare enfin, pour moi, celle de me dédier toute entière à la terre),
c’est non seulement commencer à y penser,
à tenter d’anticiper nos besoins,
les directions que nous choisirons de prendre,
ou pas,
mais c’est aussi, d’une certaine manière,
commencer à faire germer des graines.

Des graines de lin, de muscari, endormies,
mais surtout des graines d’idées, d’envies.
Les poser dans des carnets, les voir évoluer,
et pour cela commencer à expérimenter.

Quelle joie, toujours, que celle de l’expérimentation.
Essayer, rater, chercher, tenter et retenter,
rater encore avant de voir apparaitre
l’esquisse d’un chemin sinueux et fugace.

Végétaux et porcelaine papier,
pour un premier temps d’essais.
Créer ainsi un alphabet fragile, sans savoir ce qu’il adviendra de ces merveilles,
sans savoir encore comment leur donner sens,
comment les faire exister au delà des “jolies petites choses” qu’à ce stade, elles sont.

Comment les relier au fil que Sylvie et moi
tenterons de suivre et de tisser tout au long de cette résidence,
un fil nourri de gestes, de savoir-faire et de réflexions,
nourri aussi de notre vécu, de nos mémoires,
de nos ressentis et de nos émotions.

Nous aborderons cette expérience en pensant
à ce qui pousse à l’ombre et dans le silence du ventre de la terre,
et du ventre des femmes.

À suivre…



Une résidence

Bientôt. Posted on 18 Jan, 2023 11h09

L’association Arte Diem, dédiée à la pratique de la céramique
et installée à Saint-Chamond, dans la Loire,
m’a invitée à résider quelques temps en ses locaux,
au fil de l’année 2023.

Ainsi, tout au long de cette année,
j’interviendrai de manière ponctuelle auprès des adhérents
qui chaque semaine viennent travailler la céramique,
mais aussi dans deux classes d’une école du quartier.

En mars, mon amie Sylvie Delphaut, céramiste à Toulouse,
me rejoindra pour un temps de travail à quatre mains.

Ce sera l’occasion pour nous de dialoguer
avec la terre en guise de mots,
de jouer de nos différences mais aussi de ce qui nous lie,
autour du thème de la fécondation, de la germination,
de la puissance de vie du féminin en écho à celle du végétal.

Ce travail donnera lieu à une exposition (en fin d’année),
mais également à une vidéo, une expo photos et un catalogue,
puisque nous serons accompagnées à l’occasion par une photographe et un vidéaste.

L’inauguration de cette résidence aura lieu ce vendredi 20 janvier,
dès 18 heures, dans les locaux d’Arte Diem à Saint-Chamond.


Nous présenterons, Sylvie et moi, une petite exposition
rétrospective de notre travail ainsi que d’un diaporama,
qui donneront un aperçu de notre parcours.

Patricia Pichon, la présidente de l’association,
ainsi que sa directrice, Nadège Vidal, et toute l’équipe d’Arte Diem
seront heureux de vous accueillir à cette occasion.

À bientôt?



L’uniformisation

Tenter de dire Posted on 16 Jan, 2023 15h14

Uniformiser donc.
Les minots, les plus grands,
pour gagner des sous, pour gagner du temps…

Imaginons la joie de maman et papa le matin,
et la joie des enfants.
Plus besoin de penser, de réfléchir,
à comment se vêtir.
Non, là au pied du lit,
tous les matins de la même vie,
la même tenue, les mêmes habits,
pour tous les jours et tous les enfants d’un pays.

Vous imaginez? Le gain d’espace de temps d’argent de liberté d’égalité ?

Vous imaginez le bonheur de ne plus avoir à penser à comment se fringuer ?
Donc à comment se dire,
comment se raconter,
comment exprimer qui on est,
comment crier sa singularité, sa différence, son unicité.

Plus de temps perdu à inventer, à s’inventer,
plus d’argent perdu à tenter d’exister avec qui on est,
avec qui on veut être,
même plus besoin de respirer.

Oublions tout cela,
ils ont pour nous l’uniforme solution,
un pour tous et tous le même.
Et pourquoi pas un pyjama rayé ?

Et on nous dit que cela gommerait les disparités
sociales, économiques, religieuses!
Les riches en seraient donc moins riches, les pauvres moins pauvres,
les croyants moins croyants ?

Ils savent que c’est pour notre bien,
ils ont connu cela, et ils n’en sont pas morts.
Ils savent si bien ce qu’il nous faut,
ce dont on a besoin.

Alors Madame l’épouse de,
et Messieurs Dames en bleu foncé cravate et tailleur ajustés,
je réponds à votre appel d’offre.

Une tenue pour jeune fille,
une pour jeune garçon,
confortables et pas tristounes.
Idéales pour la pratique du sport comme pour celle de la dictée (c’est économique),
avec des références à Henri Matisse et à Yves Klein (c’est artistique),
mais également au monde du travail (car faudrait pas croire qu’on est là pour chômer),
un petit nombril aéré, pour l’uniformité (tout le monde a un nombril, alors pourquoi le cacher ?),
quelques rayures pour mémoire,
et avec ça, interchangeables!

On s’y met ?
À réfléchir, ou à uniformiser le monde?



C’est parti

Comme ça... Posted on 03 Jan, 2023 17h27

Le compteur des jours est à zéro.

Les couleurs s’en fichent pas mal, des jours,
elles ne comptent pas, les couleurs,
ou si peu.

C’est comme certain président qui découvre soudain,
à l’aube de 2023,
que la terre se réchauffe.
Si on nous avait dit que ce président ne savait pas lire
(les rapports du GIEC entre autres),
qu’il ne savait pas voir,
ni entendre,
si on nous avait dit qu’il ne savait que compter,
alors peut-être qu’aujourd’hui il ne serait pas là
à nous dire qu’il ne savait pas.

Les couleurs, donc,
si loin du président,
si loin des costumes bleus sombres,
si loin des tailleurs pour dames qui ne sont autres que des costumes bleus sombres,
si loin de la vie dont on veut nous faire croire qu’elle est la vie.

Moi je ne m’en fiche pas des couleurs,
Je les aime parce qu’elles sont justement la vie,
dans leurs plus fines et infinies nuances.

Elles sont tout le contraire de ce monde binaire,
de soi-disant gentils,
de soi-disant méchants.
Les gentils blancs riches, avec qui nous serons gentils,
les méchants noirs pauvres, avec qui nous serons toujours plus méchants,
parole de ministre (gentil ?méchant ?) qui vit le monde en noir et blanc.

Belle année 2023,
en couleurs,
à l’infini.







Des verts avant l’hiver

Comme ça... Posted on 09 Nov, 2022 17h17

Retour sur une collecte et une expo d’automne…

De haut en bas, herbes, feuilles et fleurs “cueillies” autour de l’atelier.

Sculpture/personnage suspendu, Elle soigne (Grès, textile récupéré, vêtements anciens, objets glanés, rebuts en tous genre)

Sculptures/personnages sur socle, Petit Jardin et Grand jardin (Grès, textile récupéré, objets glanés, rebuts en tous genre)

Nuancier de l’herbe et des feuilles, ensemble et détail (42 petits formats, 19×29 cm. Technique mixte sur papier aquarelle Arches)

Sculpture/personnage sur socle, Mère patience (Grès, textile récupéré, objets glanés, rebuts en tous genre)

Les sculptures sur socle, aussi appelées Les petits lunaires, sont nées lors d’une “résidence thérapeutique” que je me suis organisée suite à une intervention chirurgicale. Par la patience, le soin et l’attention qu’elles m’ont demandé, elles m’ont aidée à me réparer et à vivre sereinement cette transformation, ce passage.




Une visite?

En cours Posted on 27 Sep, 2022 15h43

De la lumière, de l’ombre,
des reflets verts,
mousse, pré ou lichen,
verts subtils et infinis,
qui piquent, accueillent, nourrissent, protègent ou rafraichissent.

Verts oubliés par trop d’humains pressés,
relégués à l’inutile, à la futilité,
à la promenade du dimanche…
On respire, c’est si doux, mais c’est déjà fini.

Verts d’un monde qui s’éteint,
et que j’ai eu envie de décliner, là,
en nuancier de l’herbe et des feuilles,
en figures féminines et végétales, nées de rebuts textiles,
et pourvoyeuses de vie, de soin, de poésie.


Et puis, en écho, des graines,
cinquante collections de graines.

Vous n’avez pas pu vous déplacer?
Alors entrez!

Poussez la porte,
avancez vous,
Ouvrez les yeux, les mains.

Avec délicatesse, tiroir après tiroir,
découvrez les trésors que recèle ce précieux grainetier.

Graines
Des graines de joie légère, ou de colère, des petits grains de trois fois rien,
semences précieuses, sauvages ou raffinées, secrètes ou exhibées,
coquilles ouvertes, coquilles fermées.
Des fragments rassemblés, bouts de terre, de fils emmêlés,
bouts de chair.

Des germes sans menace, sinon celle de la vie des femmes et de ce qu’elles ont dans les mains :
l’infini pouvoir de soigner, d’éveiller, de créer, d’élever.

Femmes qui inventent, protègent et multiplient la vie,
cette vie que d’autres s’obstinent méthodiquement à détruire.

Modelées, brodées, pliées, gravées, tournées, illustrées, cousues, soufflées, découpées,
frappées, imprimées, ciselées, feutrées… ces graines ont été créées par cinquante femmes
qui se sont prêtées au jeu de donner corps et cri à ce précieux symbole.

Présentées dans les tiroirs d’un meuble de métier ancien, à la manière d’un conservatoire
symbolique des énergies créatrices féminines, elles sont autant d’œuvres minuscules de porcelaine,
de grès, de textile, de feutre, de métal, de brindilles, de nacre, de lino, de papier…

De haut en bas, Gaby Matrioshka, Catherine Herbertz, Ségolène Géry, Bertille Derail,
Sylvie Delphaut, Agnès His et Odile Viallon, Sandra Coelho, Delphine Caraz.

Un court aperçu des œuvres minuscules qui sommeillent à l’ombre de leurs tiroirs de bois,
et se dévoilent à celles et ceux qui, avec patience et gourmandise,
font le trajet de les découvrir.

L’exposition Fertile, et l’installation Graines sont encore en place jusqu’au 30 septembre.
(jusqu’à midi pour les graines, jusqu’à 18 h pour le reste de l’exposition).
Pour rappel, les horaires de la médiathèque sont :


Mardi : 12h-17h
Mercredi : 10h-12h/14h-18h
Jeudi : 10h-12h/14h-18h
Vendredi : 10h-12h/14h-18h
Samedi : 9h-13h

Et comme les expositions se suivent et entrent parfois en collision…

Je participe, cette année encore, à l’exposition collective Éphéméride,
avec une série de douze muraux en céramique, au format 20×20 cm.

J’ai travaillé cette année en pensant à ceux qui restent.
Aux femmes, aux mères,
aux frères qui attendent,
qui listent et empaquètent tabac, saucisson, coquillettes,
comme ma grand-mère l’a fait durant onze années de sa vie.
Pour ses fils enrôlés de l’autre côté de la mer,
pour son mari soldat sans doigts, prisonnier au bout du monde,
là où aujourd’hui une autre sinistre et stupide guerre se joue.

Petits soldats de plomb, humains de rien du tout,
il faut bien que les grands s’amusent,
de ces corps, de ces vies, de ces pions,
de ces hommes qui aiment et qui respirent,
qui ont peur, qui obéissent, qui tuent ou ne tuent pas,
qui brûlent leurs bras pour ne pas trahir leur pays,
ce pays qui les a envoyé là-bas,
se faire stratégiquement dézinguer,
par d’autres pions armés.

C’est un carnet trouvé et datant de 1917 qui m’a accompagnée dans cette envie et cette idée.
Dedans, des brouillons de lettres adressées à un frère envoyé “faire la guerre”,
et des listes numérotées,
Chocolat, conserve de lapin, de faisan, chaussettes et cigarettes
une vie entre les lignes,
celle de ceux qui restent.
Comme des pointillés entre la guerre du jour et celle d’il y a un siècle,
qui me racontent qu’il y aura toujours des hommes pour jouer à la guerre,
avec la vie d’autres hommes,
et qu’il y aura toujours des femmes, des mères, des sœurs, des frères,
pour les attendre.


Vous souhaitez que l’on s’y rencontre?
Je serai présente samedi 1er octobre, entre 15h et 17 heures, et dimanche 9 octobre entre 16h et 19H.

À bientôt,








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